La Gazette de Barcelonnette 2005 (par Thierry FOSSEPREZ)

LA GAZETTE DE BARCELONNETTE
Thierry Fosséprez

Vendredi 15 juillet 2005

Elles commencent bien nos vacances, à Anne-Marie et moi ! Au rendez-vous fixé à Martelange, chez Gérald à « La Petite Q8 », je constate \ »qu’on\ » a oublié le sac de chaussures à Marvie (Mais je suis presque sûr que ce n’est pas moi !)… On embarque dare-dare Clémentine qui nous accompagne jusqu’à Barcelonnette et on file sur Marvie à toute allure… Pas un mot dans la voiture, mais je sens que ce sera de ma faute… Le sac récupéré, on reprend la route et on retrouve la caravane Vélo-Passion sur l’autoroute, peu après le péage de Gye. Par le plus grand des hasards, Cyrille et Bernadette, qui avaient envisagé de partir de leur côté, se retrouvent tout à coup avec nous et décident de faire la route en notre compagnie. Voyage sans incidents, parfait, ou presque… Entre Grenoble et Gap, le trafic est passable, mais par contre entre Gap et Barcelonnette, c\’est un festival de camions, de caravanes et de tracteurs, qui fait chuter notre moyenne à 28 Km/h entre ces deux villes. Arrivée à l\’hôtel en début de soirée : chambre nickel, accueil chaleureux, calme incroyable à deux pas du centre ville, bref rien à redire…

JOUR 1 – Samedi 16 juillet 2005

René opte pour une mise en jambes relax et prévoit une montée facile vers Maljasset, petit village perdu dans les montagnes… 36 km aller et 36 km retour, histoire de prendre contact avec la haute montagne. 07h00 : avec sa discrétion habituelle, Jean-Claude réveille les cyclos (et les épouses…) et accessoirement tout l\’hôtel. 07h30 : Solide déjeuner de montagnard… Le café a l\’aspect et la consistance du carbonyle et a beaucoup de mal à passer… Photo souvenir sur le parking et c\’est parti, direction Jausiers… Virage à gauche et ça monte tout en douceur. Après une quinzaine de km, traversée d\’un tunnel en travaux, où la visibilité est nulle malgré les phares d\’une voiture qui nous suit. Nous quittons la route du col de Vars, dite \ »Route des grandes Alpes\ », pour traverser Saint-Paul-sur-Ubaye, un beau petit village dressé sur son promontoire… La route commence à grimper sérieusement… Des alpinistes sont collés sur une vertigineuse paroi rocheuse… Impressionnant ! Un peu plus haut, halte près de l’audacieux pont du Châtelet, construit d\’une seule arche en 1882 sur un à- pic de 110 mètres au dessus de la rivière. Gérald, fou amoureux de la montagne, mais aussi victime du vertige, n\’apprécie que très modérément le spectacle, accroupi derrière le parapet et marchant presque à quatre pattes…. Nous reprenons notre ascension et, à La Blachière, une fontaine accueillante nous procure une eau à 5°, fraîche, délicieuse, très appréciée sous ce soleil de plomb. La route se dégrade progressivement et se termine tout à coup en cul de sac. Là, des dizaines de randonneurs s\’élancent, entre les moutons, vers les sommets… l\’Italie est à un jet de pierre. Nous redescendons par le même chemin, nous admirons encore une fois les forteresses de Tournoux creusées dans la roche. Retour à l\’hôtel : douche, apéro, que ça sent les vacances. Au souper (plutôt au dîner, … nous sommes en France tout de même !!!), on parle du col de Pontis, entre autres au programme de demain… Corine (l\’aimable serveuse, qui entre nous, est tombée dans l\’œil de Gérald) nous dit \ »Ainsi, demain, vous faites le tour du lac de Serre-Ponçon … par Pontis ?\ », René répond par l’affirmative… Corine lève les yeux au ciel… Gérald en remet une couche… Apparemment, on va souffrir demain… Cyrille contemple une belle moto stationnée sur le parking en rêvant enfourcher ce véhicule pour monter le Pontis…

JOUR 2 – Dimanche 17 juillet 2005

Le col de Pontis est, comme dit René, parfaitement inutile… D\’ailleurs, une route moderne, presque plate permet de l’éviter, mais cette ascension est une épreuve incontournable pour tout cyclo et les vues au sommet sur le lac artificiel de Serre-Ponçon valent vraiment la peine. Les commentaires vont bon train, à l’approche du col : « C\’est dix fois la Knüpp, mais en plus dur ! » On quitte tout à coup la route bordant le lac et hop tout à gauche, c’est plus sûr… René nous explique que c\’est un plaisir de faire ce petit crochet bien sympathique ! (Ce type est fou furieux). La pente y est fort raide, environ 10%, avec quelques raidillons à 14 – 15%… On passe de 800 à 1200 m en 4,5 Km, mais je grimpe bien, à mon rythme, comme d’habitude. Cela ne serait pas trop grave si la température n\’oscillait pas entre 36 et 41° à l\’ombre, mais détail important : il n\’y a pas d\’ombre ! Par contre des taons, ce n\’est pas ce qui manque, et qui dit taons, dit Gérald… Pas de doute, il est dans les parages. Arrivé au sommet, c\’est pour entendre ce dernier dire le mot pour rire du jour : \ » C\’est moins dur qu\’on ne le dit\ ». Il est incroyable ce mec… Descente de fou vers Savinne-le-Lac, sur l’autre versant, où on se trouve au niveau du lac… Ravito en eau à Chorges, on remonte le col Lebrault, 1110 m, nouvelle descente et passage à côté de l\’impressionnant barrage en terre (Le plus grand d\’Europe, la rampe de 700 m retient 1.300.000.000 m³ d\’eau !) Il est midi, arrivée à Espinasses… Tiens, ça rime avec conasse, avec pétasse aussi… Et ça tombe bien, vu le caractère très spécial de la tenancière du resto, mais comme il n\’y en pas d\’autre, on s\’écrase ! Le garçon, par contre, est sympa et partage notre avis en ce qui concerne sa patronne, mais à voix basse…. Il nous explique un peu le profil du reste de la randonnée : « 15 km de montée vers le col Saint-Jean, après il n’y a plus de difficultés, sauf un petit \ »coup de cul\ » après le Lauzet-Ubaye… » On la replacera celle-là ! Ensuite vient donc la dernière grosse difficulté de la journée, la montée vers le pied du col Saint-Jean, 15 bornes… Et le thermomètre indique désormais 41.7° ! Un bidon avalé, et l\’autre directement sur la tête. Récupération au sommet, et retour vers Barcelonnette avec le vent dans le dos… Pour une fois les calculs de René sur la direction du vent sont exacts. L\’hôtelière Corine nous accueille avec des 1667 de 0.75 l, affonnées illico presto. Le soir, au repas, Jean-Claude opte pour une recette mexicaine, avec une sauce \ »relevée\ », un mélange de vitriol et start-pilot, le tout avec des fayots. Demain, c’est sûr, pas question de rouler derrière lui…

JOUR 3 – Lundi 18 juillet 2005

Ce matin, changement de décor, la météo est incertaine, quelques gouttes tombent sur la terrasse… Des 41° d\’hier, il n’en reste que 22 tout au plus. En ce qui me concerne, le mélange carbonyle local et coupe de fruits provoque un brûlant de tous les diables… J\’ai l\’estomac aux bords des lèvres au pied du col qui n\’est qu\’à 3 km de l’hôtel… Je décide de rester avec Cyrille. Gérald est parti en trombe, comme d’habitude, mais encore une fois il se fait niqué par André au sommet…Arrivent ensuite René et Jean-Claude… Celui-ci a bouffé du lion, c ‘est sûr, à moins que ce soit la sauce d\’hier qui lui donne un pareil jus. Le col d\’Allos est magnifique, la route est taillée dans la roche, avec de petits ponts pour traverser les torrents. Comme de coutume dans la région, des bornes nous indiquent le reste du parcours ainsi que le dénivelé du prochain km. Le litre d\’eau déjà avalé ne parvient toujours pas à éteindre l\’incendie de mon estomac… Nous traversons les Agneliers, où les remonte-pentes attendent l\’hiver et les skieurs. Le ciel s\’assombrit tout à coup et des rafales de vent annoncent un orage imminent. De fait, à 2,5 km du sommet, c\’est la drache ! On enfile les K-way mais on décide tout de même d\’achever coûte que coûte. Les cadors redescendent déjà, Gérald fait peur : il a les yeux exorbités, rivés sur la route, et il nous remarque à peine (Mais ça c’est assez habituel). Demi-tour vite fait au sommet, et c\’est la descente toute en finesse, la route est détrempée et très glissante, mais c\’est un bel exercice pour un cyclo. Retour à l\’hôtel : Malox, douche, Malox, dîner ultra light et sieste réparatrice en prévision des 3 cols de demain. Au dîner, l\’orage est juste en dessus de la ville et il tombe toujours des cordes d\’eau.

JOUR 4 – Mardi 19 juillet 2005

La journée commence bien : d\’abord, il y a ces rumeurs d\’idylle entre Gérald et Corine (c\’est la charmante dame qui prépare les déjeuners). Il nie, mais force est de constater que seul, Gérald a reçu du Genépi dans sa gourde avant de partir. Ensuite après 330 m, en plein centre-ville, Jean-Claude crève… Il tient son vélo pendant que nous le réparons, ceci sous les fenêtres d\’un autochtone encore au lit et qui se met à vociférer tant et plus ! On décampe histoire de ne pas recevoir le pot de chambre sur la tête. Guy et moi sommes obligés de rentrer à l\’hôtel pour nous laver les mains, le vélo du colibri n\’étant qu\’une tache d\’huile. Jean-Claude n\’a pas ces problèmes, forcément, il n’y a pas mis la main ! Le programme initial avait prévu le circuit des 3 cols, mais l\’orage de cette nuit a eu raison du col de la Cayolle qui est fermé pour cause d\’éboulements… Changement de programme, ce sera donc le col de Vars. Après La Condamine, des ouvriers dégagent à la pelleteuse la terre qui a envahi la route. La température est fraîche mais le soleil est enfin de retour… Françoise prétend qu\’il y a 300 jours de soleil à Barcelonnette, on verra bien ! Le Vars, en partant de Barcelonnette à 1130 m d\’altitude, fait environ 1000m de dénivelé. Après 14 Km de mise en jambe jusqu\’à La Condamine-Chatelard, la pente s\’accentue. On profite des derniers instants de répit pour admirer les gorges de l\’Ubaye. A partir de Saint-Paul-sur-Ubaye, on attaque la partie difficile sur 8 Km avec un km à 11% après le hameau de Melezen. Gérald arrive le premier, les bras levés vers le ciel… (Et il prétend toujours ne pas faire la course !) André le suit de peu, arrivent ensuite René et moi–même puis Jean-Claude, Guy et Cyrille…. Vient ensuite encore un incident : Gérald, en réglant un problème de selle, heurte malencontreusement le vélo d\’un jeune breton, qui glisse doucement le long du piquet contre lequel il était appuyé… Incroyable mais vrai, le cadre est fendu ! Palabres et discussions, assurances etc… Gérald se serait volontiers passé de ce petit contretemps…. Par contre André, insatiable, décide de redescendre sur l’autre versant jusqu\’à Guillestre, d\’y manger et de remonter le Vars dans l\’autre sens ! Chapeau ! L\’après midi, Gérald s\’embarque seul dans la Bonnette, après une entrecôte-frites arrosée de pinard ! Re-chapeau ! Mais avant, et comme il sait parler aux dames, il va demander à Corine si le col est déjà ouvert ! (Bientôt, ils vont choisir les prénoms des enfants… si c’est un garçon, Gérald hésite déjà entre Shimano et Campagnolo). Quant au reste de la troupe, c\’est en compagnie des épouses que nous décidons de visiter le lac d\’Allos. Le coin est magnifique, c\’est le plus grand lac naturel d’Europe à cette altitude. Il s’étend sur environ 50 hectares et une profondeur maximale de 49 mètres, ce qui confère à ce plan d’eau des couleurs sombres et des eaux très froides. Il est alimenté par la fonte des neiges et de nombreuses sources. Les mélèzes et les sommets tels que la montagne de l’Avalanche 2732 m, la Tête du Lac 2678 m d’un côté et le Mont Pelat 3051 m de l’autre, qui l’encerclent donnent à ce lac un environnement particulier. Le hic, sont les voies d\’accès : cols, chemins de chèvres, tournants, et j’en passe… Si bien que Danielle et Anne–Marie ne garderont pas un souvenir impérissable de cette ballade. On revient par le col d\’Allos, versant sud… Guy, Jean-Claude, Cyrille et moi ne rions plus du tout… Ce ne sera pas facile cette ascension après 90 km le jour des 3 cols…

JOUR 5 – Mercredi 20 juillet 2005

La Cayolle étant toujours fermée, c’est donc la Bonnette au programme de ce mercredi. Tous connaissent déjà sauf Cyrille et Jean-Claude… Ce sont 24 km de toute beauté. Au départ de Jausiers, la monte se scinde en deux : une première partie relativement facile mais sauvage, ensuite une seconde partie avec de nombreuses cascades, un petit lac où les sifflements des marmottes agrémentent l\’ascension. Gérald, dit le \ »Jardinier de la Bonnette\ », part en compagnie des costauds que sont André et René. Guy, Jean-Claude et moi formons désormais le groupetto de service. Cyrille, fidèle à sa tactique, monte à sa main. Après quelques ravitos en eau puisée directement dans les torrents, nous arrivons à Restefond. Guy qui souffre des genoux, n\’est pas bien et pour cause : arrivé au sommet, il constatera qu\’il lui restait une dent de réserve ! Après la caserne, arrive le cirque de la Bonnette, noir et sinistre à faire peur, mais il permet de remettre du braquet avant de gravir les horribles 800 derniers mètres… Pied à terre quelques instants, en ce qui me concerne, tellement c\’est dur. Jean-Claude, qui a eu l\’outrecuidance de dire à René, lors d\’une certaine réunion de préparation à Vaux, qu\’il l’écrasera dans la dernière rampe, se fait chambrer par le Président qui ne cessera de lui rappeler, toute au long de la journée, ses 33 minutes de retard !!! André a encore niqué Gérald, mais ils décident tous deux de descendre vers la vallée de la Tinée et de refaire la Bonnette versant sud ! Gérald se fait à nouveau piqué par un taon, ce qui rassure André : en effet, tant que Gérald est dans les parages, ils tournent tous autour de lui, comme quoi le malheur des uns …. Nous redescendons prudemment d\’abord, arrêt coca à « L’Altitude 2000 », et nous plongeons sur Jausiers, René et moi à tombeau ouvert comme souvent… Mais à la sortie de Lans, à 60 km/h, je crève de la roue avant ! Perte totale de contrôle, heureusement la route est large à cet endroit et je ne tombe pas, ça tient du prodige. Si cet incident se produit 2 km plus haut, je suis fossilisé à jamais dans le rocher. Réparation et retour cool à Barcelo. Demain, farniente au lac de Serre-Ponçon pour certains et col de la Lombarde pour d\’autres.

JOUR 6 – Jeudi 21 juillet 2005

Port Saint-Pierre est une petite plage aménagée au bord du lac de Serre-Ponçon. Jean-Claude, Cyrille et moi, en compagnie de nos épouses, passons une journée bien agréable au soleil. Claudine reste à l\’hôtel à attendre André qui accompagne le reste des cyclos qui ont préféré s\’attaquer au col de la Lombarde. A midi, nous mangeons une espèce de fourrage appelée ici « Salade Provençale » arrosé d\’un petit vin de cubi n\’ayant pas supporté les bouchons du voyage au vu de l\’odeur ! Nous quittons ce paradis vers 16h00, et de retour à l\’hôtel, nous apercevons Claudine, comme Pénélope, toujours là à attendre… Les gaillards ne sont pas encore rentrés ! Comme la montée vers Pra-loup est au programme aujourd’hui, je décide de faire, seul, cette ascension vers la célèbre station de ski. C\’est juste 21 km aller-retour, avec une partie à 10%, histoire de tourner les jambes et garder le contact.

JOUR 7 – Vendredi 22 juillet 2005

Au programme de cette dernière journée: Le Circuit des Trois Cols, autrement dit, La Cayolle, les Champs et Allos, soit 125 Km dont 75 Km de montée et un dénivelé cumulé qui devrait friser les 3175 mètres! Il est 07h00, j\’ai mal aux jambes et pourtant je suis encore au lit… Ca promet. Petit déjeuner et la petite troupe se retrouve sur le parking de l\’hôtel, prêt à en découdre avec ces 3 cols. Première mésaventure de la journée, René ne trouve plus ses chaussures de cyclos, rien de moins ! Fouille de la chambre, de la voiture, suspicion d\’une blague de mauvais goût, que du reste personne n\’aurait envisagée. Explication : la veille après la descente du col de la Lombarde, René a enlevé ses chaussures à l’arrière de la voiture comme d’habitude ; mais il l’a reculée d’un bon mètre car un arbre gênait pour remettre les vélos sur le toit et les pompes sont restées sous le véhicule ! Que faire ? En acheter des neuves pardi… René revient avec de magnifiques « Looks », et de surcroît, assorties à la belle tenue reçue la veille. Résultat des courses, nous quittons Barcelonnette vers 9h30. Direction le col de la Cayolle… Ce n\’est pas mon jour, ça se sent tout de suite, j\’ai les jambes comme des planches… C\’est décidé, promis, juré, je fais uniquement la Cayolle et je redescends. Pourtant la montée n\’est pas si difficile, en deux parties : dans la première, les agents de DDE sont toujours occupés à réparer les dégâts des orages et à voir les moyens mis en œuvre, ça a craqué grave. Les cinq derniers Kms sont plus pentus mais c\’est quand même rétamé que j\’arrive au sommet… Je préviens les copains qu\’il est, en ce qui me concerne, hors de question de poursuivre la route ! Guy, Cyrille et Jean-Claude partagent mon avis, mais, sous la pression de René, c\’est ce dernier qui le premier change d\’idée : \ »j\’essaye\ » et quand Guy aussi retourne son vélo vers le sud, je comprends tout de suite que ça va être ma fête aujourd\’hui. Descente groupée, pause Coca à Saint-Martin-d’Entraumes, au pied du col des Champs, et servi par… la Belle des Champs (la serveuse est pile poil comme dans la pub). La montée du col des Champs est très belle et joint la vallée du Haut Var à celle du Verdon… Le dépaysement est total, l\’escalade se passe dans la forêt pour se terminer dans les alpages, avec, un replat d\’un bon Km pour reprendre son souffle… Mais arrivé près de la dernière bergerie, fini de rire, c\’est du costaud, du très costaud ! Au sommet, René dort dans l\’herbe, et André, arrivé premier comme d\’habitude, part à la rencontre des retardataires. Jean-Claude est bien, Gérald est tout blanc, on sent qu’il nous fait un léger malaise… Guy, victime d\’une espèce de turista, a tout juste le temps de traverser un petit restaurant avant la catastrophe… Cyrille a trouvé sa formule et moi je gère…et digère… Deux sympathiques dames de Douai prennent la traditionnelle photo souvenir au sommet puis nous plongeons vers Colmars. A Ratery, je stoppe devant une auberge perdue au milieu des bois, où nous décidons de casser la graine… Il est déjà 15h00 et René a l\’estomac dans les talons de ses magnifiques chaussures. Au menu, assiette de charcuterie et (une) bière, pas très malin ! Gérald vire maintenant au gris alors qu’il reste encore 50 bornes ! Descente périlleuse vers Colmars, la route est infecte, pleine de trous… 24 Km nous séparent du Foux d\’Allos, au pied du col d’Allos… On remonte le cours du Verdon… C\’est un faux-plat montant mais avec un vent terrible de face… Je n\’en crois pas mes yeux, mon compteur indique 12 Km/h ! André et René sont loin devant. Avec Jean-Claude, on tente de s\’organiser pour résister au vent, mais en vain. Cyrille et Guy font de même et Gérald, qui a désormais viré au vert-pomme, ferme la marche. Le Col d\’Allos, on avait fait sa connaissance en revenant du Lac d\’Allos… En voiture, quand on lève la tête, on voit les lacets et les ponts, il n\’y a pas d\’ombre et la pente est de 6-7 % sur 6 km… A 2 km du sommet, René est arrêté la tête sur la potence !? Jean-Claude, chambré comme pas deux depuis deux jours, sent sa revanche \ »Là, derrière le panneau, René est arrêté\ ». Mais celui-ci l\’entend, tourne la tête vers nous, remonte sur sa machine et grimpe comme un beau diable… Il avouera plus tard : \ »Plutôt mourir que d\’arriver après le Colibri Leyder\ »… Mais il avouera aussi avoir réexpédier l\’assiette de charcuterie dans la descente du col, sans s’arrêter, à 60 Km/h ! Vous imaginez la voiture qui aurait dépassé à ce moment-là… Il aurait ainsi vu repasser l\’excellent jambon de pays, le délicieux saucisson de montagne, etc… Quand on vous dit de manger de jolies choses ! Classement de l\’étape : 1er – André, qui nous attend depuis belle lurette, il a même enlevé ses chaussures ! 2ème – René, qui a tout donné pour ne pas être rejoint par le Colibri Loco, et ce malgré son estomac vide… 3ème – Votre serviteur qui suis René de quelques secondes… 4ème – Jean-Claude et 5ème – Gérald qui, miracle, nous revient à la vie… Cyrille est désormais souriant et enfin Guy termine, les tripes nouées, sans jeu de mots. Après un coca réparateur au refuge du col, je décide de rejoindre l\’hôtel au plus vite, pour rassurer nos épouses, car il est quasi 18 h00… La descente du col d\’Allos est un vrai régal : tout y passe, slalom entre les voitures, freinage in extremis… Ma crevaison de la Bonnette est provisoirement oubliée, un de ces jours … Fini le vélo, demain on rentre. Le soir, dîner au « Coco Loco », un petit restaurant mexicain sur la place… Vu la quantité phénoménale de vin ingurgitée dimanche dernier par le groupe, c\’est désormais en amis que le garçon, véritable sosie de Benoit Poelvoord, nous accueille. Le gars est hyper sympa (oui, oui même en France), nous reconnais évidemment et va même jusqu\’à offrir la bouteille du Patron, c\’est dire ! Gérald est déchaîné… A l\’agonie cet après-midi, il est désormais resplendissant. Néanmoins, il noie dans les produits locaux (liquides) sa cinquième place à l\’arrivée de la \ »Grande Etape Alpestre\ ». Il parle de dérailleurs, de pignons, de selles, de jantes, de taons pendant deux heures, puis tout à coup il se lève, va rejoindre les femmes à l\’autre bout de la table en disant, \ » Je change de compagnie… En face, ils n\’arrêtent pas de parler de vélo\ » Il demande une cigarette à Danielle, l\’allume et se met à draguer nos épouses ! Unique ! Il en gardera quelque chose, c\’est garanti.

Conclusions :

Voilà une semaine passée à la vitesse du son… Barcelonnette, c\’est un paradis pour les randonneurs et nos randonneuses mais c\’est aussi La Mecque pour les cyclos… Il y en partout, et ici tout est magnifique. Des paysages à couper le souffle, un climat extraordinaire, une qualité d\’environnement remarquable qui ne peut qu\’engendrer le respect (Ici, personne n\’a envie de balancer ses détritus le long des routes) et chose rarissime; cette région, il est vrai, très difficile d\’accès, n\’est pas encore envahie par les hordes de touristes sauvages… Ici on vient en amoureux de la montagne, pourvu que ça dure, et longtemps !
Je rentre avec des images et des souvenirs plein la tête, mais aussi avec l\’agréable sentiment d\’avoir passé une semaine extraordinaire, certes pour les exploits sportifs (C\’est vrai que gravir ces cols mythiques, ce n\’est pas à la portée du commun des mortels) mais aussi et surtout d\’avoir passé cette semaine en compagnie de personnes charmantes et de qualité, que j\’ai eu plaisir à découvrir et à redécouvrir.
Merci à René qui, comme l\’an passé, et fidèle à son habitude, a concocté un programme complet, varié et apprécié de tous… Chapeau à André, sur qui les années n\’ont pas d\’emprises ; qu\’elle santé ! Pareil pour Jean-Claude : coup d\’essai, coup de maître… Idem pour Cyrille qui découvrait la haute montagne. Respect à Guy, pur courage ! Mille excuses à Gérald pour ce qui précède, mais qui est entièrement … vrai.
Remerciements sincères, à nos épouses, qui font toujours preuve d\’une belle patience avec nous, même en vacances et sans la Grande Bleue.

Il y a un an, je concluais la Gazette de Briançon en écrivant \ » Vivement l\’année prochaine \ » Je ne change pas la formule.

Week-end à Chevetogne 2005 (par Cyrille GREGOIRE)

Week-end à Chevetogne ou les élucubrations d\’un colibri qui pavoisait comme un paon.
Un soleil radieux et des températures caniculaires vont nous accompagner tout au long de ce week-end que nous démarrons le vendredi soir par un apéritif bien arrosé suivi d\’un excellent spaghetti préparé par la famille Leyder.
A l\’issue du repas, Jean-Claude reçoit des mains de notre président un magnifique maillot jaune au dos duquel il est imprimé \ » LEADER CHALLENGE COLIBRI \ ». Notre ami est très fier dans sa nouvelle tenue mais aussi un peu frustré : il aurait préféré que l\’on imprime \ »LEYDER CHALLENGE COLIBRI \ » car c\’est dans la (neage neyge) neige à Prouva qu\’il prouvy, pardon c\’est à Prouvy qu\’il prouva (je m\’y perd dans ces a et ces y) qu\’il était le maître incontestable de ce trophée.
La nuit est assez agitée pour la plupart des participants, le sommeil est superficiel et est interrompu à intervalles réguliers non par le chant du coucou ou du colibri mais celui des chasses d\’eau. Y aurait-il quelques prostatiques dans le club?
Samedi matin : le grand jour est arrivé. Nous partons pour une longue randonnée d\’environ 180 kms qui va nous conduire à travers la magnifique région du Condroz namurois et liégeois.
Ceux qui auraient pu croire que le Condroz c\’est déjà un peu le plat pays vont très vite déchanter car les côtes vont se succéder gentiment le matin (j\’en ai dénombré 3) mais frénétiquement l\’après-midi (j\’ai commencé à en dénombrer 3, puis mon cerveau probablement tombé dans un état narcotique profond a été incapable de continuer à compter).
Dans le peloton, le colibri s\’est senti pousser des ailes (tiens c\’est bizarre pour un oiseau!). René doit durcir le tempo pour l\’empêcher de s\’envoler même s\’il lui donne de temps en temps un billet de sortie pour se montrer dans l\’un ou l\’autre village, surtout quand de jolies petites jeunes filles se pointent à l\’horizon. Pendant ce temps, Claude et Ernest, infatigables, travaillent entre les lignes pour ramener le traînard que je suis ou le malchanceux Guy qui a des problèmes de dérailleur et qui peste contre un certain Jimmy.
Le matin, nous effectuons une grande boucle qui va nous conduire de Chevetogne à Ouffet, Villers-le-Temple, Spontin, nous faisant découvrir au passage les côtes de Somal, de Marchin et du Château de Spontin. Un fait remarquable est à relever : entre Assesse et Natoye, nous croisons un fervent admirateur qui nous salue et nous encourage d\’un signe du pouce. Il ne s\’agit de personne d\’autre que Tom Bonen en chair et en os! Du moins c\’est ce que nous pensons car, parait-il, il serait actuellement en Italie!!!
Vers midi, nous nous arrêtons à Spontin pour un temps de repos et de repas bien mérité. Tandis que nous remontons notre glycémie à coup de doubles cocas, Albert qui nous a rejoint se remonte le moral à coup de triples orval.
L\’après-midi nous fait découvrir les paysages sublimes de la vallée de la Meuse entre Annevoie et Hastière et nous franchissons allégrement les côtes qui la bordent de part et d\’autre. René propose un petit crochet par Ciergnon avant de rentrer à Chevetogne. Nous acceptons, ce qui entraîne pour René un sucroît de plaisir et pour moi la liquéfaction totale. Nous rentrons enfin dans le domaine de Chevetogne et surprise! Quelle mouche a piqué l\’oiseau-mouche? Le voilà qui s\’envole dans un fulgurant sprint final! Mais Claude et René ont de la bouteille. Ils lui laissent un instant d\’illusion mais avant la ligne ils le déplument.
Nous terminons la journée par un excellent restaurant suivi de la dégustation de quelques bonnes cuvées régionales ou autres.
Le lendemain Thierry et Jean-Luc (décidément, il ne me lâchera pas la grappe, pense notre oiseau) nous rejoignent pour un décrassage matinal dans la région de Rochefort et c\’est par un excellent barbecue préparé par les bons soins de la famille d\’Albert que se termine ce très beau week-end auquel je vous engage à venir nombreux l\’an prochain. Vous vous en souviendrez.
Cyrille Grégoire.

La Gazette de Briançon 2004 (par Thierry FOSSEPREZ)

JOUR 1 – Dimanche 18 juillet 2004

Col de Montgenèvre et col de l’Echelle

07h30 : Réveil difficile…Solide petit déjeuner, quelques  anecdotes croustillantes (comme les croissants) de Gérald, genre « J’ai deux vélos, un en panne et un autre ok, devinez lequel j’ai pris ? » -«  Je crois que j’ai oublié une manchette à Chaumont… c’est pas grave, j’alternerai les bras ». Après la traditionnelle photo souvenir devant l’hôtel avant le départ, les dames (Clémentine, Gisèle, Cécile, Béatrice et  Claudine) ainsi que les messieurs ( René, Ernest, Guy, Emile, Gérald, Coco, André, Patrice, Thierry et Lionel, un copain de travail français de Raymond Houba qui va nous accompagner toute la semaine) quittent l’Hôtel pour la première sortie de nos vacances qui, d’après le président, devrait être la plus facile de la semaine, mise en jambes oblige… Après deux kilomètres d’échauffement, pas plus, à la demande du groupe, je pique un sprint d’ 1 Km environ pour prendre quelques photos du peloton qui a vraiment fière allure, tous les membres ayant revêtu le nouvel équipement… Bien mal m’en prit, car, une fois les clichés réalisés,  re-sprint exténuant pour raccrocher le groupe qui file plein pot… Et c’est à  bout de souffle que je les rejoins juste …au pied du col ! Inutile de vous dire que rapidement la montée se transforme pour moi en calvaire, n’ayant jamais l’occasion de trouver mon fameux second souffle… Nous quittons Briançon, la vue sur la ville est magnifique. Les dames nous laissent pour bifurquer à gauche, car elles préfèrent effectuer la montée vers Les Chalets du Laval, avec tout de même 63 km aller-retour… Bravo les filles… Passage du col de Montgenèvre, relativement facile, (sauf pour moi). Ensuite, une dizaine de Km de descente avec une pente variant de 5 à 8 %… De quoi peut-être retrouver mon second souffle… On bascule vers l’Italie, la descente est magnifique sur 11 km, belles routes bien larges et en plus un excellent revêtement. On arrive à Ulzio, première ville italienne… Quelques hésitations dues sans doute à la méconnaissance des panneaux italiens, et oh surprise, on se retrouve sur une  bretelle d’autoroute, évitée au tout dernier moment ! Nous arrivons dans la vallée de Bardonnéchia, et nous nous dirigeons vers le col de L’Echelle (Colle Della Scala en Italien). Après deux kilomètres d’ascension, un immense panneau nous indique clairement de tourner à gauche (Col de l’Echelle: 3,8km)… tout le monde obtempère sauf… devinez…Gérald, vous savez, le frère de l’autre, qui, emporté par son élan, poursuit tout droit et se retrouve très vite dans…un cul-de-sac. Heureusement, car je pense que nous n’étions pas prêts de le revoir. La route s’élève rapidement, nous découvrons de là haut toute la vallée, une splendeur… La pente est raide avec des pics de 10 à 14 %… Emile entraîne les ténors du groupe, mais à l’arrière, un groupetto se forme avec Ernest, Guy et moi-même…. La chaleur est accablante contre les rochers (31.7°) mais heureusement une belle brise nous rend des couleurs et du courage,  peur-être aussi grâce aux jolies bronzeuses qui bordent la route. Les copains nous attendent au sommet, photo souvenir prise par un touriste italien qui, pour mieux la cadrer, se déporte sur la route (ou plutôt la piste…) et  manque de peu de se retrouver sur le capot d’une Audi. La descente est très longue et la route n’est pas terrible. René, à la corde dans un virage, manque de couper en deux  un cyclo qui grimpe bien à sa droite; Patrice joue les toréadors avec l’aile d’une voiture… Le retour de la rue principale de Briançon jusqu’à l’hôtel achève de nous couper bras et jambes : 800 m à 8% sur un chemin essentiellement de pierres. Tout le monde sprinte mais la plupart explose au beau milieu, la sortie ayant été beaucoup plus fatigante que prévu… Merci président.
Oh ! surprise : nos femmes ne sont pas rentrées de leur sortie : elles nous expliqueront plus tard que les paysages fantastiques qu’elles ont eu l’occasion de contempler sur la route les ont ralenties, voire stopper quelque fois… Une sortie qui vaut vraiment la peine, au point qu’elles se sont bien promises d’y retourner… en voiture pour une séance de solarium en altitude… 

JOUR 2 – Lundi 19 juillet 2004

Col de l’Izoard 

Pour la famille Schronweiller les vacances sont déjà finies (Après 15 jour à Malaucène au pied du Mont Ventoux) et ils rentrent vers la Belgique, mais la famille Louis au grand complet nous a rejoint. Ce lundi, toutes les dames décident de faire une marche vers la Chapelle St Arnould. Les messieurs s’attaquent au mythique col d’Izoard, au travers d’une randonnée de 102 Km concoctée par René et Emile. Nous quittons Briançon et après seulement quatre km commence la montée. Les 5 premiers Km de l’ascension permettent tout juste de se mettre en jambe, viennent deux Km de plat, on se regroupe et ensuite fini de rigoler, les douze Km les plus durs de l’Izoard sont devant nous. Comme de coutume, les costauds s’envolent déjà, et à l’arrière, le groupetto s’est à nouveau reformé… Heureusement la route est belle, le décor est fabuleux, mais il règne une chaleur « de biesse « . Quand on consulte les panneaux au bord de la route, on se rend compte que les distances qui nous séparent du sommet varient de plusieurs Km et , ces panneaux devenant  de plus en plus contradictoires, mon moral en prend un coup : sommet à 9 ou 11 km ???  Arrive enfin le refuge Napoléon, situé à 2290 m d’altitude ; encore une borne assez difficile et c’est le sommet. Le podium à l’arrivée : premier Lionel (le Français, on a bien fait de voir ce qui l’avait dans les jambes avant de lui rappeler les exploits de l’équipe de France au Portugal –  promis on la fermera !) deuxième Patrice, troisième Emile… Photo souvenir devant le monument du sommet et c’est déjà la descente, avec un arrêt obligé au pied de la stèle dédiée aux champions Coppi et Bobet : vue magnifique sur le torrent de l’Izoard situé 60 à 100 mètres plus bas. Plongée ultra rapide vers le Combe de Queyras (90 Km/h), magnifique vallée encaissée entre les rochers. Arrivée à Guillestre pour tout le groupe, malheureusement en plein jour de marché… on cherche un resto sympa, on fait trois fois le tour de la ville, les autochtones croient au retour des six heures de Guillestre. Sur la grand place, un resto se présente enfin à nous. Je me rince le visage à la fontaine, deux voyous profitent de l’occasion pour me basculer dans la fontaine, tête la première … Qu’ils n’oublient pas que la vengeance est un plat qui se mange froid !!! Le resto est sympa, d’autant que c’est 50% moins cher qu’à Briançon. Reste quarante bornes pour rentrer : Emile connaît : »C’est tout en descente, dit-il, sauf trois petites côtes pas terribles, des formalités en sorte ! » Mon œil, les formalités, même Gérald en a perdu les pédales ; écarlate qu’il était ! Et en fait, les trois formalités se transforment en cinq, six sérieuses grimpettes. A 5 km de l’arrivée, Emile explose son pneu, en arrivant à Briançon « Ca t’es bon » ai-je même entendu; heureusement, il a une « guettre », et aussi une chambre à air toute neuve mais … crevée. Patrice, la main sur le cœur, lui en prête une autre … crevée aussi, mais hourra, la troisième est enfin la bonne. On rentre à Briançon par la ville basse, ce n’est pas de la tarte non plus, avec 196 m de dénivelé, plus la « niche gritchette » vers l’hôtel. Et c’est après une sortie pareille que nous apprécions la douche du cyclo, la plus belle invention après la roue (Mavic, évidemment)

Jour 3 – mardi, le 20 juillet 2004.

Le pré de Madame Carle

Avant l’ascension tant redoutée de mercredi, à savoir la terrible Bonette, René avait prévu en ce mardi une semi-journée de repos avec la sortie vers « Le pré de Madame Carle ». Surprise, surprise ! Primo, la pluie est des nôtres… secundo, la montée est loin d’être une promenade de santé (On commence à s’habituer à ses appréciations…). Départ d’Argentière-La Bessée que nous avons rejoint en voiture ; sont présents : André, Ernest, (qui s’est enfilé du sauciflard pur porc afin de mieux passer les cols), René, Damien, Emile, Gérald, Guy, Patrice, Lionel et Thierry. Mais aussi  Clémentine, Gisèle, Cécile et Claudine. Si les dix premiers Km ne posent pas de problème, à partir de Vallouise, par contre, ce n’est piqué des vers, c’est bien parti… Comme d’hab., les costauds lâchent les autres assez rapidement, la route s’élève dans une vallée étroite et boisée, la pluie redouble… A Ailefroide (La bien nommée aujourd’hui), le pourcentage double !!! après le camping, c’est pratiquement la Redoute ! Mais en trois fois plus long ! Passé le dernier pont à deux km du terminus, on croit que c’est fini et que l’on est au sommet, mais, chose extraordinaire, on a l’impression que la route descend alors qu’il n’en est rien, ce qui fait dire à Guy « Ici, même les descentes sont dures !». La vue en haut est impressionnante : tout est gris, le glacier sur la droite est lugubre, de plus la pluie glacée n’arrange vraiment rien. Café chaud dans le refuge, attende en vain que la pluie cesse et nous redescendons. Juste après le pont, surprise : Gisèle, Cécile et Clémentine en terminent avec l’ascension ! Tous les mecs en sont bouches bées… chapeau les filles ! D’autant qu’elles tiennent à terminer complètement la montée. Ernest et René font demi-tour et les escortent pendant les deux derniers km. Coup de chapeau spécial à Gisèle qui a littéralement porté ses deux compagnes de route jusqu’au sommet. La descente est dantesque, il pleut toujours, la route est glissante, les freins sont hésitants, néanmoins pas une voiture ne parvient à nous suivre. J’ai mal aux doigts tellement je tire sur les freins ! Dingue, un gamin aurait reçu une claque depuis longtemps. Au parking à La Bessée, on retrouve Claudine, qui a été à la limite de ses forces avant de redescendre plus tôt que les autres. Repas de midi en commun à l’hôtel : Gérald, peut-être un peu intrépide, décide de goûter à l’andouillette… A mon avis, le pauvre, il n’est pas près d’en reprendre. Comme chacun sait, pour une bonne andouillette, il faut que les tripes soient bien rincées, ce n’était apparemment  pas le cas. D’autant, qu’il avait prévu de s’attaquer, l’après-midi même, au terrible col du Granon en compagnie d’André et d’Emile. L’histoire ne dit pas s’il a digéré le Granon ou s’il a fait l’andouille sur la route. Une autre partie du groupe s’en est allée visiter le village-musée de St Véran (qui vaut vraiment le détour) et enfin, la troisième partie opte pour la sieste. Demain, la Bonette…Je stresse déjà !

Jour 4 – mercredi le 21 juillet 2004.

La Bonette

Gisèle et Emile, ayant opté pour l’étape reine du tour de France qu’ils vont suivre à l’Alpe d’Huez, ne sont pas des nôtres aujourd’hui. La Bonette, j’en ai rêvé cette nuit, Bonette par-ci, Bonette par-là, depuis le temps qu’on en parle ! Pour déjeuner, Ernest expérimente, aujourd’hui, une nouvelle recette : miel, yaourt et saucisson… faut le faire ! On rejoint donc Barcelonnette en voiture (90 km dans les montagnes)… En cours de route, Lionel doit faire le plein, et il nous rejoint après vingt longues minutes … son coéquipier, Gérald, au bord de la congestion vu le temps perdu par le français à discuter avec le pompiste et le facteur, se calme tout juste après cinq Imodium… il faut savoir que la Bonette, c’est l’ETAPE de Gérald, pas question de la rater ! Il roule dans son jardin aujourd’hui. Dans le peloton, tout le monde parle du futur et probable jumelage des villages Chaumont-Jausiers, les parrains étant Jacques et Gérald, off course ! René au volant dans le col de Vars, ce n’est pas de la rigolade, j’en ai l’estomac au bord des lèvres. J’en ai même entendu un qui récitait un acte de contrition à l’arrière, et comme dit Guy «  dans les routes des Alpes,  on redeviendrait croyant ». A Barcelonnette, c’est jour de marché, encore une fois! Donc on gare les véhicules hors de l’agglomération. Pour les dames, visite de la ville et shoping sont au programme. (Clem’s va faire chauffer la carte bleue de son père). Départ de Barcelonnette, et jusque Jausiers, une agréable mise en jambe de dix bornes et hop, virage à droite vers Nice et c’est parti. Plus un mot, les groupes se forment comme d’hab. ! La route s’élève régulièrement entre 6 et 9 % entre les chalets Cocodi (Avec I ou bien Y suivant les Petits dictionnaires) Regroupement imprévu après 7 Km d’ascension dû à des travaux de renforcements de parois rocheuses. Chapeau pour les gars du MET local : pendus à des cordes, ils placent des filets pour retenir les pierres, (Mathieu SA peut en prendre de la graine). La route se rouvre enfin devant nous, les flingueurs en remettent une couche, les  » néo-grimpeurs  » poursuivent à leur rythme l’ascension de ce qui constitue pour Gérald la Mecque des cyclos. Cette plus haute route d’Europe, qui culmine à 2808 m d’altitude, rassemble tous les paysages des Alpes, c.a.d. du boisé, des prés, des torrents, des lacs de hautes montagnes, des sommets de oufs, tout ceci  agrémentés par les sifflements des marmottes qui  donnent vraiment l’impression de se moquer de nous. René avait dit qu’une fois arrivé à la caserne de Restefond, l’affaire était « in the pocket »… bien vu chef, pour les deux kilomètres suivants, mais les huit cents derniers mètres !!! Une formalité, d’après Emile… C’est en fait une portion de 800 m d’enfer, un mur, les plus longs 800 mètres de ma vie. Scotché « on the tarmac », que j’étais ! Pas moyen d’en voir le bout (J’ai même eu le temps de lire la marque et l’année de fabrication du réservoir perdu par un automobiliste en perdition dans les derniers mètres). (Très) longue récupération pour chacun devant un décor féerique et bien sûr photo souvenir devant la stèle du sommet et c’est déjà le retour. La descente n’est pas une simple affaire, avec de crapuleuses lignes droites et de non moins crapuleux virages… Juste avant la caserne, j’ai brusquement un blocage de la roue arrière, et ensuite de la roue avant… Le muret arrive à une vitesse folle, tout flotte à l’arrière ! Didju, je vais me faire mal ! Les « aie, aie, aie » de Damien qui me suit ne font rien pour me réconforter ! Mais heureusement ça passe de toute justesse… Encore une voix : René « Ca calme, pas vrai ! » Il a bien raison ! Dans la descente, un hollandais, sans doute vexé de se faire dépassé par Patrice, se décale dangereusement vers le milieu de la route pour le balancer dans l’accotement !! Finalement, regroupement au pied du col  et retour vers Barcelonnette… Après 4 ou 5 km, alors que tout le groupe roule prudemment à la queue leu leu à cause d’une circulation plus qu’intense, Patrice, encore lui, sans doute désireux de montrer à tout le groupe sa magnifique pointe de vitesse, de décale brutalement d’un bon mètre vers le centre de la route,  au sprint debout sur les pédales pour dépasser Damien… Heureusement que le français qui arrive derrière est attentif et a juste le temps de se dresser sur les freins, car notre flingueur se retrouvait sous la voiture !!! Pendant cette ascension, tous les participants, unanimes, ont apprécié les encouragements extraordinaires, de,  en premier lieu, l’incomparable Mathilde, la fille de son père, qui à une voix qui porte sur cinq vallées… (La terreur des marmottes, d’après les gars du coin), de Véronique et d’An-Cath, les photographes de service, d’Emilien, Amélie, Alix et enfin Clémence qui ont crié, hurlé, encouragé les maris, les papas, les vieux, les jeunes, les nickels, les à peu près, les foutus, les vermoulus, les cramés… bref, une participation comme pas d’autre à cette ascension. Merci de tout cœur à tout ce petit monde pour ces encouragements qui, mine de rien, font un bien fou. Le vieux jeton que je suis à été on ne peut plus sensible à ce geste ! Repas à Barcelonnette, il est 15h45 : affamé, il est moins une avant que je ne mange la nappe… l’inespérée première choppe arrive, le repas aussi,  et déjà je reprends goût à la vie. Souper à l’hôtel et aux plumes plus tôt que prévu, sauf Gérald, qui noie sa quatrième place au sommet dans un seau de Pelforth. En conclusion, la Bonette est magnifique,  avec un bémol pour la fin, en sorte le pompon sur la bonnette.

Jour 5 – jeudi, le 22 juillet 2004.

Les chalets du Laval.

Si la Bonette laisse des traces dans la boite à souvenirs, elle laisse aussi des traces dans les jambes. Et curieusement, tout le monde donne l’impression de vouloir passer une journée cool, sans doute le phénomène du jeudi. Même Lionel, habituellement aux avants postes, a rejoint le groupetto, histoire de décrasser… Cécile et Gisèle roulent aussi. La montée est toute en douceur jusqu’au camping du Laval, situé à deux kilomètres du sommet, malgré une crapuleuse bosse à 10 % après 21 Km. Quel calme : juste le bruit de l’eau et des oiseaux… A 5 kilomètres du sommet, Guy qui  casse net sa bague de selle en passant dans un nid de poule : et c’est en danseuse ou assis avec les genoux pratiquement contre le menton qu’il termine courageusement et atteint également les fameux chalets du Laval. Depuis le camping, les épouses nous rejoignent au sommet à pied. Pré-apéro au chalet pour les cyclos et enfin tout le monde se retrouve à Névache, dans un resto hyper sympa. Tout simple, une fontaine et quelques tables au milieu de la pelouse, un rosé frais et une carte qui fait l’unanimité. Pour trouver ce resto, il faut se paumer quinze fois dans le bourg avant de tomber dessus, mais cela vaut la peine. Retour sur Briançon : rosé plus virages, c’est un truc à gérer ! Juste le temps pour certains de plonger dans la piscine de l’hôtel, pour d’autres de se retrouver au bar de l’embuscade, lieu de hauts faits d’armes. Si Lance à fait fort à l’Alpe, le temps mis par les embusqués pour repérer, découper et enfin s’enfiler le saucisson de Guy, est à mettre dans le Guiness book des records. Le soir, de mauvaises langues affirment que le Président n’aurait pas apprécié le souper : soit il y avait un arrière goût de Génépi, soit il n’aimait pas le taboulé ! Françoise à un avis très précis à ce sujet ! Demain, dernière journée dans les Alpes, avec au menu : le Galibier !

Jour 6 – vendredi le 23 juillet 2004.

Le Lautaret et le Galibier

9h00 – départ : Gisèle et Clémentine sont de la partie, mais Cécile, sans doute refroidie par la chaleur de la veille, préfère suivre en voiture et ce, malgré les relances assidues d’Ernest ! La montée vers le Lautaret ne présente pas de difficulté majeure, la rampe douce nous emmène de Briançon 1200 m au pied du Galibier à 2057 m,  où un regroupement est prévu … Puis tout le monde s’élance vers le sommet de ce fameux Galibier. Jusqu’à l’entrée du tunnel, qui perce le sommet à environ un kilomètre, c’est très régulier, et un petit vent frais nous fait beaucoup de bien. 2555 m d’altitude, il reste un kilomètre très difficile à 9 % de moyenne. Mais là-haut, la vue est impressionnante, des centaines de cyclos de toutes nationalités montent comme des fourmis multicolores. Du sommet, tout le monde suit attentivement l’ascension des dames. Gisèle arrive, en vociférant sur un automobiliste distrait… Ce dernier ne s’est pas rendu compte que ce n’est pas le moment d’énerver Gisèle ! Clémentine arrive au tunnel, sous les yeux de son père… (Montera – montera pas, ce terrible dernier kilomètre ?) Josette, Annie et Cécile l’encouragent sans relâche. Elle remonte sur sa machine… René, la larme à l’œil, suit la progression… Il reste 500 m, peut-être les plus durs… Ernest et Patrice descendent pour l’aider, pied à terre à nouveau, courte récupération, elle n’a plus de jus du tout mais elle achève au courage… Enfin c’est fait, elle est dessus du Galibier… Félicitation Mademoiselle Godfrind ! Les infatigables Emile et Gérald décident de descendre sur l’autre versant jusqu’à  Valloire et de remonter encore une fois le Galibier. Photo souvenir devant le monument dédié à Henri Desgrange, à l’entrée du fameux tunnel, puis plongée au Lautaret. Casse-croûte réparateur… Jean–Claude, notre rédacteur journal et sa famille, en vacances dans la région de Saint-Michel-de–Mautienne, sont venus nous saluer. Sympa. Dernier retour vers Briançon. La descente est géniale, avec de larges routes, 76 km au compteur ! En rangeant mon vélo, je réalise que ces vacances sont finies… Mais que ça passe trop vite !

Conclusion :

C’est ma première expérience en montagne : mon seul but était de la découvrir et surtout d’arriver au sommet de ces fameux cols, et si possible sur le vélo. En plus des vues superbes, de l’exploit sportif, de cette masse d’effort, de ce sentiment de satisfaction une fois le sommet atteint, il y a aussi le reste…
La vie en groupe : réunir une bande pareille, faire prendre la sauce n’est pas une évidence. Allier les goûts de chacun, trouver la juste mesure pour varier les activités sportives ou non, alterner les randonnées faciles et difficiles sont des exercices où René excelle, et je tiens à le remercier ici. Remerciement aussi pour sa brochure-programme qu’il a réalisée et que nous avons respectée. Remerciements aussi aux épouses et au Dr Liners, qui font toujours preuve de patience, même en vacances. Coup de chapeau à Emile, André, et Gérald, pour leurs formidables mentalités, même remarque pour les deux gangsters qui m’ont flanqué dans la fontaine. Merci de nous avoir tant attendus aux sommets. Merci aussi à Ernest et Guy pour m’avoir accompagné dans le groupetto.

Vivement l’année prochaine!

Soulor de Juillet 2003 (par Thierry FRANCK)

Soulor de juillet

C’était le 246 ième jour de l’an 2002 et le cinquième du stage dans les Pyrénées de notre club vélo-passion de Vaux/Sûre. Ne voulant pas épiloguer sur cette année pleine d’expériences vélocipédiques, je me limiterai aux derniers jours.

Le premier jour avait vu H. Arbes, le fidèle lieutenant, celui qui camoufla le Blaireau blessé (Abandon de B. Hinault à Pau le 9-7-1980), nous faire visiter le col de Marie-Blanque suivi par l’Aubisque et puis le Soulor, non sans avoir préalablement cheminé sur les contre-forts du Béarn lors de cette cyclosportive de160 km rudement bien organisée. Le temps avait été de la partie, les ravitaillements à la hauteur, les paysages magnifiques et il faut bien le dire, les ascensions douloureuses, la chaleur suffocante, le plateau repas réparateur.

Le lendemain, le climat dans la vallée nous avait lessivé à grande eau de ces souvenirs récents, sur une magnifique piste cyclable en pente douce jusqu’à Argeles. La sueur, les taches de sel et de sucre avaient rapidement disparu, mieux qu’aucune machine n’aurait pu le faire. Une quantité de flotte incroyable, et pourtant on est quand même habitué à progresser sous des climats humides par chez nous… Ce même climat nous a ensuite parfaitement essorés lors de la montée au col de Tramassel, autrement dit le fameuse montée d’Hautacam, siège d’exploits démesurés dans le chef de Riis au gros braquet (16-7-1996) et d’Amstrong au gros moulin (tour 1999) ; deux styles inverses pour une même vitesse incroyable. Lors des dernières rampes, le vent nous poussait littéralement dans le ravin, obligés de mettre pied à terre pour ne pas s’envoler. Le sommet ne fut pas à la hauteur de cette formidable ascension. Rien ; un parking, du vent, des nuages plus bas voilant toute la vallée. Le retour fut rapide vers Aspin en Lavédan, dans cet ensemble hôtelier magnifique où le club avait déposé ses bagages cette année.

Lors du troisième jour, c’est vers le col d’Aspin que nos roues nous conduisirent, cette fois tous ensemble, maris et femmes, père et fille ; le temps s’était remis au beau fixe, les kilomètres d’échauffement se sont étirés jusque Ste-Marie où le faux plat commença à décimer la troupe. Au sommet ce sont des vaches indigènes, tachetées de noir et brun qui nous accueillirent ; langues en alerte , elles nous débarrassèrent du sel accumulé sur notre peau lors de la montée. N’étaient-ce pas déjà elles qui assaillirent Bartali, Bobet et Robic ici-même il y a environ trente ans (25-7-1950 : chute au sommet, bousculade des supporters français) responsables de l’abandon de tous les coureurs italiens craignant pour leur santé. Il en faudra plus pour parvenir à déstabiliser un club de grimpeurs belges. Le dîner au pied de la forge d’E Christophe (Lieu de réparation d’une fourche brisée au pied de la descente du Tourmalet : 9-7-1913), une pensée pour lui autour d’une pizza et pour les moins fatigués, retour à travers les contreforts du Tourmalet, par le chemin inverse que L. Jalabert ouvrira en tête lors de l’étape du tour 2002. Le col de Lingous et la dernière descente un peu trop rapide pour certains pour arriver au bercail où l’apéritif, le plantureux repas et le repos bien mérité nous attendaient.

La veille du sacré jour, un groupe de 8 partit, destination Boucharro. Sur le chemin nous discutons avec des Anversois, qui se dirigent à menu braquet vers le Tourmalet, un des leurs a rencontré de plein fouet un skateur, la veille, sur la piste cyclable, le danger est vraiment partout… Au retour, nous croiserons le tour de France cyclotouriste qui se dirige également vers le géant de la vallée, pour faire étape à Barrèges. Que de cyclos, sur tous types de bécanes, de tous genres, de tout âge, de tout sexe. Voilà une expérience intéressante. Un petit arrêt sur le pont Napoléon et la route continue ; Gavarnie nous voici ! En prévision du lendemain, je me dois de ne pas me mettre dans le rouge, résister à cette tentation est douloureux, autant que les derniers kilomètres… Au sommet du col de Tente, un barrage de grosses pierres tente de nous empêcher le passage jusqu’au col de Boucharro. Chute de pierres, danger. Ce n’est pas grave, au lieu de zigzaguer, au travers des pentes les plus rudes, je contournerai les amas de gravats et les blocs de pierres, de loin cela paraît plus élégant J’emmagasine les cols. Le temps demeure rassurant.

Et nous voilà enfin à pied d’œuvre. Aucun copain ne voulant s’anoblir de la sorte , le « nous » est uniquement composé de mon fidèle et blanc assistant à deux roues, triple plateaux et neuf pignons et du humble narrateur.

Le jour dit point. Par la fenêtre entrouverte, un doute m’assaille. Eh oui, nous sommes en montagne, dans les Pyrénées, et il fait gris. Rien ne peut arrêter un galérien, changement de tenue, lunettes de soleil dans l’étui et départ solitaire. La pluie est là. Elle peut prendre tellement de formes, je pense à ces pluies d’orage, où les routes ruissèlent mais où l’on passe à travers les gouttes, échappant à l’humidité ambiante, la tête haute et sèche. Ici je suis mouillé, mes jambes sont sujettes à une rosée particulière, des milliers de perles éclatantes enfilées sur des milliers de poils, mais l’environnement semble sec. La route à peine luisante, je déjeune à Argelès de deux croissants et d’un tampon ; il est 7 Heure 50.
La route s’élève de suite, histoire de se mettre d’emblée dans un drôle de bain. A partir de 800 mètres d’altitude, brouillard. Où sont ces paysages tant attendus, ces vallées verdoyantes, ces vaches, ces fleurs,… ces collègues à deux roues ?
Soulor de juillet : il ne me subsiste que la rêverie.

Le compteur et l’altimètre permettent de ne pas se perdre complètement dans une douce folie. Je revois E. Merckx, là devant, sous un soleil impérial, ayant abandonné le peloton au sommet du Tourmalet pour passer devant son coéquipier, et ne se retournant plus jusqu’à Mourenx Ville Nouvelle (15-7-1969) ; son directeur sportif l’exhortant à ralentir et lui, déjà serti de jaune, lavant l’affront du giro, poussant de plus en plus sur ses pédales et augmentant sans cesse son avance. Deuxième arrêt : le col est là. Un cycliste se change contre un mur, vite, un café dans le relais des Marmottes qui ouvre justement. La route continue, ne pas perdre trop de temps ni de chaleur. J’avais bien vu le balcon du Litor le premier jour ; sujet au vertige, je ne peux que me réjouir des conditions climatiques, il faut rester positif. La route remonte vers le grand frère, l’Aubisque, et plus la route monte, plus la brume roussit ; les quelques mètres de paysage qu’il m’est offert de démasquer furtivement prennent une teinte rouillée, le soleil est là pas loin, juste un peu plus haut. Quelle peste qu’il n’y ait point de baronnie au Tourmalet ! là il doit faire clair…

Descente jusqu’à Laruns. Pendant la descente, je ne peux rêver, usant rapidement mes patins de freins, c’est au rythme de mes grelottements que j’atteints la première étape. J’entre dans le premier débit de boisson chaude, bégaie ma commande et tente de me réchauffer devant les yeux surpris des touristes ayant délaissé leur programme de ballade pour augmenter leur note de café. Fidèle GSM, je contacte ma moitié pour une assistance impromptue. Rendez-vous est pris au sommet du deuxième Soulor de la journée, avec des vêtements secs et chauds. Il ne faut pas s’attarder, la route reste longue et je suis persuadé que seule la chaudière de mon train-train gravissant me réchauffera. Les vieux pins laissent la place à Eau bonne. Après l’accentuation de la pente, je retrouve la brume, Chiappucci et le roi Miguel sont devant (Première prise du maillot jaune par Indurain 19-7-1991). Ils doivent encore se « taper » un fameux palmarès. Biquet aussi s’est évadé ici (Robic 1948 ). Gourette à présent et cette rouille qui embrase les derniers hectomètres où je rattrape trois braves cyclos qui grimpent de concert en se parlant sans se voir. Voici la descente vers le cirque, Wim Van Est est en retard, il doit prendre des risques si il veut conserver son maillot jaune (17-7-1951). Le virage, la chute, la remontée du ravin, 20 mètres plus bas en s’agrippant aux boyaux noués, et la montre Pontiac indemne, qui rapportera plus d’argent en publicité que la belle tunique.

La descente demeure dangereuse, la brume disparaît dans les tunnels mais, ce n’est pas pour ça que j’y vois plus clair. La petite remontée et un véhicule connu apparaît au sommet du deuxième Soulor. Ma tendre moitié s’y est blottie, elle m’apporte mes tenues hivernales. Surchausses, maillot doublé, cuissard long et imperméable. Il est 13H 02. Nous dînons rapidement d’un sandwich, et après le bisou du dessert, nous nous séparons, direction Arthez d’Asson pour le deux roues. Quel désagréable surprise, la route vient d’être recouverte de gravillons et les roues grésillent . Il faut redoubler de prudence et diminuer encore la vitesse de croisière. J’inspecte tous les blocs de ciment de la descente, sur lequel B. Thevenet est-il tombé ? Il s’était relevé de suite et était reparti à grande vitesse, mais il ne savait plus où il allait, dans quelle course il se trouvait, victime d’une petite commotion cérébrale (9-7-1972).

Au pied de la descente, le temps s’ouvre, ici c’est sec. Après une petite collation dans un café sans âge, où les publicités de boissons des cinquante dernières années se côtoient, c’est le départ de la dernière ascension. Je la connais depuis l’étape du tour de 1997. Nous partîmes 7000 et nous arrivâmes beaucoup moins au port. Quelques jours plus tard, chez les professionnels, l’équipe Festina avait dynamité la course… on sait maintenant comment.

A Ferrières, une route à gauche et une idée, la route tourne à droite et c’est reparti dans les pourcentages. Les douleurs sont moins présentes lors de cette ultime ascension, cela doit être l’odeur de l’écurie.

Il est 16H38 quand j’entame une discussion avec un cyclo provençal qui collectionne les BCN,BCF (brevets cyclotouriste où l’on doit collecter des tampons de lieux remarquables en France) au snack du sommet.
Ouah! Plus que descendre, quoique…..

La brume est toujours présente, mais la fatigue annihile mes angoisses, la vitesse croît. Il faut se méfier des derniers virages avant Arrens-Marsous. J’y entends pleurer Hugo Koblet, avec son maillot rouge frappé de la croix blanche, des emplâtres sur les jambes, entrant dans l’ambulance blanche frappée de la croix rouge. Le virage, le muret et puis un saut périlleux à 80 Km/h (13-7-1953). Enfin le village et comme par enchantement, la brume disparaît, la rêverie disparaît, mon plan est échafaudé depuis longtemps maintenant. Première route à droite, la route remonte jusqu’au col des Bordères où je réalise un demi-tour. Membre de la confrérie des cent cols, c’était trop tentant, c’est pas demain que je reviendrai.

De retour à Arrens, je reprends la route du retour, elle est maintenant plate dans la vallée. Quelques kilomètres plus loin, nouveau carrefour, mon sang ne fait qu’un tour, le petit plateau tombe à pic et je remonte au col de Coudaruque. Ce col est magnifique, du type pastoral serpentant. Au sommet un parking et un motor-home. Je hèle le touriste italien et examine ses cartes routières. Ca doit passer, il n’y a pas de bitume, je suis en pneu de 23. Je me lance dans la descente, mains sur les freins. Une pensée pour les forçats de la route qui réalisaient tout le tour de France sur ces routes pleines de gravats et avec des freins bien moins performants. Un refuge sur la droite et des marcheurs qui n’en croient pas leurs yeux de voir passer un vélo de course là où un VTT n’irait pas plus vite tellement les gravillons sont glissants. Après cette interminable descente, je retrouve un sol plus agréable mais une ultime grimpée. Ici le col est sauvage et forestier. Bonjour col des Spandelles.

Enfin souffler. Se laisser descendre jusqu’à Argelès où le dernier tampon termine de noircir ma feuille de route. Il est 19 H 30.

La piste cyclable sous le soleil. Mon ombre me paraît si grande, ai-je grandi ce jour ?

Le retour à l’hôtel, le dîner et le repos bien mérité. Sur mon compteur, 192 Km et 4945m de dénivelée. Dans ma tête, plein de souvenirs et déjà, ….. vous avez dit fondu de l’Ubaye, fêlé du colombier, Paris-Brest…..

Le vendredi est le dernier jour du stage, il nous reste a escalader le fameux Tourmalet. Le temps semble de nouveau avec nous. Les jambes n’ont pas encore oublié le Soulor, ça ne tourne pas facile. La montée depuis Luz se fait dans un train d’enfer, peu après Barrèges, je verrai partir mes amis, préférant monter à ma main. Sur le sommet, le vent s’est levé, les nuages approchent. Après la photo protocolaire devant le géant, je préfère rentrer de suite. Je suis de suite pris dans un nouveau et violent orage, bon dieu, rien n’est épargné au nouveau baron. Les amis attendrons au chaud que le plus gros passe et reviendront en passant par Luz-Ardiden.

Encore une semaine qui a défilé comme une descente à vélo.